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"Alain de Chivré, le fédérateur des astrologies"

Richard Pellard

Par Richard Pellard

Ancien rédacteur en chef de la revue "Astrologos".






Le monde astrologique est divisé en de multiples courants, écoles, chapelles, réseaux traditionalistes, karmistes, humanistes, néromaniens, conditionalistes, jungiens, freudiens, sidéralistes, rosicruciens, relativistes, spiritualistes, etc., sans parler des astrologies exotiques et des nombreuses individualités sans attaches partisanes. Ils parlent des langages si différents et envisagent les relations entre l'homme et le ciel selon des points de vue souvent contradictoires et parfois opposés. Comment parvenir à réunir ces tribus ? Alain de Chivré, président de la Fédération Des Astrologues Francophones (FDAF) tente de relever ce défi.

Richard Pellard : Alain de Chivré, quand, comment et pourquoi êtes-vous entré en contact avec l'astrologie pour la première fois ?

Alain de Chivré : J'ai fait une première allergie à l'astrologie en 1970. Un acupuncteur (astrologue) est venu à mon secours. Guérison définitive en 76-77 après un long traitement en énergétique ! En 1983 j'ai organisé un congrès d'astrologie à Nantes pour consolider ma guérison. Aujourd'hui, je ne suis pas devenu un spécialiste de l'allergie astrologique mais presque, et du reste la création de la FDAF n'y est sans doute pas étrangère.

RP : Quels sont les livres ou les individus qui vous ont le plus influencé dans votre apprentissage de l'astrologie ?

AdC :Comme beaucoup, j'ai appris le solfège avec la méthode Barbault. J'ai « picoré » un peu partout avec une attention particulière pour tout ce qui traitait de la systémique. Alors forcément en bon scorpion, j'ai bien aimé les ouvrages de Daniel Verney, excellente reformulation du discours astrologique.

Parlons plutôt du "post-apprentissage" si vous le voulez bien. C'est plus facile car plus récent  (quand on apprend les bases on est moins lucide et moins conscient). J'ai eu de la sympathie pour Claire Santagostini et je me souviens plus spécialement d'un séminaire passionnant qu'elle avait organisé sur l'anthropologie du professeur Jousse : la théorie du « mimisme », l'homme étant censé mimer l'univers. Cette théorie là m'a passionné longtemps et elle me passionne toujours parce quelle est au coeur des fondements de l'astrologie : la grande question de l'inné et de l'acquis. Je garde un grand souvenir du Congrès du CEAE à Paris organisé par la biologiste Agnès Lacourly Bousser. C'était pour moi "les grandes années" de l'astrologie, et à l'époque - ce n'est pourtant pas si vieux - on parlait beaucoup d'interdisciplinarité. Ce n'est plus beaucoup le cas aujourd'hui.  C'était d'une grande richesse. Je me souviens des interventions de Raymond Abellio, du Professeur Pinel, le mathématicien, de Jacqueline Bousquet, de l'astrophysicien Régis Glaize, de l'ingénieur Jean Michel Guillard, etc... Quel brassage d'idées fantastiques. Il n'en reste plus grand chose aujourd'hui. Pardon, j'oubliais Solange de Mailly Nesle. Elle  a justement laissé beaucoup de traces de cette grande période interdisciplinaire (voir le prolongement avec "L'Etre cosmique" chez Flammarion). La contribution de Solange au savoir astrologique et à sa diffusion est du reste très importante, ne serait ce que sur le plan culturel.  Nous lui devons beaucoup.

RP : Pouvez-vous nous donner votre propre définition de l'astrologie ?

AdC : Les définitions sont souvent source de polémiques. Je pense que l'astrologie est une systémique chargée de traiter des rapports de l'homme avec l'univers. Ce n'est pas une vérité en soi, mais plutôt une tentative de modélisation. Le thème astrologique fournit des informations sur la structure d'une personnalité (et ses rythmes) mais il ne rend pas compte du comportement. Je suis d'accord avec les conditionnalistes pour introduire cette notion multifactorielle et surtout pour croiser les informations astrologiques avec les paramètres éducatifs (entre autres).

RP : Vous êtes depuis 1996 l'un des fondateurs et le président de la Fédération Des Astrologues Francophones (FDAF). Pouvez-vous définir quels sont les objectifs de cette association ?

AdC : La FDAF n'est pas une association parmi tant d'autres, c'est une Fédération. Elle est censée rassembler les courants, les écoles et les acteurs de la vie astrologique sur un objectif commun : la réhabilitation de l'astrologie dans l'espace social et culturel. Ce n'est pas démagogique mais très concret. En effet l'astrologie n'a pas de véritable identité sociale : le métier d'astrologue n'existe pas ! La preuve : la cour de cassation vient de rendre un jugement en février dernier proclamant notre activité illicite (les faits jugés datant de 1990 - avant la refonte du code pénal - le tribunal a donc invoqué l'ancien article 34). Ceci est significatif et même inquiétant. Cela montre que le lobby rationaliste est encore très puissant en France. C'est en tout cas une raison suffisante pour que la corporation se structure et se différencie des autres disciplines (voyance, tarologie, parapsychologie, etc...).

Nous avons, du reste, commencé à établir des contacts avec les ministères pour faire valoir notre différence et notre spécificité, mais le plus gros travail reste à faire à l'intérieur de la communauté astrologique. Si l'astrologie veut se faire reconnaître, il faut qu'elle se distingue nettement des arts divinatoires et qu'elle s'inscrive dans le champ des sciences humaines. Et cela ne supprime en aucun cas sa fonction prospective, mais cela risque d'obliger les astrologues à être plus prudents et sans doute moins obsédés par l'événementiel. Sinon la confusion est inévitable. Nous avons du pain sur la planche car le rôle de la FDAF n'est pas d'imposer un type d'astrologie ni de faire la chasse aux sorcières, mais de travailler sur un label de qualité. Il est grand temps car "l'horoscopite aigue" a fait des ravages depuis une trentaine d'années et l'image de l'astrologie en a subi les conséquences.

Sur le plan culturel, le déficit d'image est un peu moins grave mais il existe néanmoins. Un exemple pour illustrer  : un colloque a eu lieu, il y a deux ou trois ans, à Chambéry sur "Le temps". Aucun astrologue n'a été invité à plancher. Est ce normal ? Décidément nous avons un énorme travail d'intégration à réaliser. Cela va supposer beaucoup d'efforts de la part de la communauté astrologique car il faut dépasser nos petits conflits de pouvoirs et de savoirs pour faire preuve de sagesse, de rigueur, de réserves et même, peut-être, de citoyenneté. Personne n'a voulu se soucier de ce problème-là jusqu'à maintenant. On se complaisait trop souvent dans la contre-culture et la marginalisation. Changeons les habitudes.

RP : Vous êtes l'un des mieux placés pour juger des divisions du milieu astrologique francophone. Sans entrer dans les détails, il existe en gros deux points de vue : soit l'astrologie est une science naturelle méconnue, soit c'est un pur langage symbolique. Comment vous situez-vous par rapport à ce débat majeur qui trace une invisible mais profonde frontière entre les astrologues ?

AdC : Je n'aime pas la dichotomie : science et symbolisme. La vie n'est pas noire ou blanche. Tout est plus subtil. Rien n'empêche l'astrologue symboliste - comme le psychanalyste du reste -  d'avoir une certaine forme de rigueur. Le langage métaphorique n'est pas forcément délirant par définition. Il demande de la cohérence. Je suis d'accord pour cette exigence mais est-ce une raison pour mettre dos à dos les symbolistes et les astrologues de « tendance scientifique » ? Les uns privilégient l'organisation du psychisme, les autres la notion d'effets. Il y a des zones d'ombre dans l'un et l'autre camp. Et puis les deux discours s'appliquent à des niveaux différents. En tout cas, je défie n'importe quel astrologue de "tendance scientifique" d'éliminer tout discours symbolique dans ses protocoles astrologiques.

RP : Vouloir réunir des astrologues aux points de vue si différents, c'est un peu essayer de construire une tour de Babel. Pouvez-vous nous dire quelles sont les difficultés que vous rencontrez quotidiennement dans votre combat pour l'unité ?

AdC : Paris ne s'est pas fait en un jour. J'ai passé l'âge des utopies. Je crois à la supériorité de la cause. Et en ce sens, je répète qu'il y a urgence car l'astrologie mercantile est en pleine expansion au dépens de l'astrologie d'étude. Le débat d'idées doit exister mais il est source de polémiques violentes. Ce sont les actions concrètes qui permettent d'avancer  et de valoriser le discours astrologique tant à l'intérieur de la communauté qu'à l'extérieur. La Fédération organise désormais des stages de formation continue pour les astrologues avec des prises en charge officielles par des organismes mutualisateurs. Cela n'a jamais existé. Ce genre d'initiative contribue à stimuler les compétences des astrologues et à sceller progressivement leur unité. Personnellement, je me suis démené pour remuer les instances officielles. Ici et là on commence à se poser des questions. Par exemple, La Maison des Professions Libérales que nous avons sollicitée pour la circonstance a été, dans un premier temps, déstabilisée par notre demande mais nous avons finalement "marqué des points" car l'organisation d'un stage d'astronomie (par un chargé de cours à l'université) et d'un stage de psychologie (par un médecin) a crédité notre démarche. Nous avons eu gain de cause car notre demande était sérieuse et génératrice de qualité. C'est par là que passe notre combat pour l'unité. Pas par le "blabla"!

RP : Vouloir réunir, cela implique paradoxalement de devoir exclure. Quels sont les critères de sélection et d'exclusion de la FDAF ?

AdC : Je me méfie de l'eugénisme. Qui peut prétendre dire quels sont les bons et les méchants ? Jusqu'à maintenant nous estimions que nous n'avions pas le droit de nous ériger en instance suprême. Nous avons donc émis des principes d'éthique qui sous tendent des questions de compétence. Ce sont ces principes qui ont constitué, de manière rigoureuse, nos critères de sélection et plutôt nos critères de rassemblement. Nous avons donc considéré les astrologues comme des gens responsables capables de s'engager sur une déontologie. A mon sens, la déontologie prime largement sur la compétence : il y a des astrologues qui ont des connaissances théoriques extraordinaires et qui font des dégâts considérables en consultation en "projetant" leur savoir de manière catastrophique.

RP : Quel regard portez-vous sur l'astrologie contemporaine et sur ses rapports avec la science officielle ?

AdC : Je déplore vraiment cette difficulté de communication et je crois que les astrologues en sont responsables pour la plus grande partie. Le discours des astrologues est assez tautologique dans le genre. On peut comprendre qu'il agace sérieusement nos interlocuteurs scientifiques quand il manque de rigueur et de mesure, ce qui est peut-être fréquent et inévitable, compte tenu de l'utilisation du langage métaphorique. Les psychanalystes procèdent eux aussi du même langage et sont quand même mieux considérés par la communauté scientifique parce qu'ils ont introduit une nouvelle donne : l'inconscient. Les astrologues ne savent pas trop où situer leur discours : dans l'inconscient, le conscient, ou le comportement ? Ils  manquent très nettement de clarté à ce niveau. Cette confusion ou plutôt cette imprécision nuit à la communication. La pratique astrologique est souvent gangrenée par les postulats et les croyances. Il faut bien le reconnaître. Nous avons un gros travail à faire sur l'objectivation méthodologique et sur la clinique.

RP : La FDAF organise en septembre prochain les journées Astroculture 98. Pouvez-vous nous parler de cet ambitieux projet et nous dire pourquoi vous en avez pris l'initiative ?

AdC : Le constat est clair : l'astrologie contemporaine dispose d'une identité culturelle déplorable. La vertu de notre discipline est menacée par la banalisation médiatique et la médiocrité. Il faut sortir l'astrologie de son carcan horoscopique et effacer certaines images d'Epinal (l'astrologue au chapeau pointu). Astroculture consiste à montrer aux journalistes et au grand public que le langage astrologique est une culture à part entière et que la pensée astrologique a sous tendu notre organisation du temps (les jours de la semaine), notre architecture (voir l'orientation des monuments) et d'une manière générale et inconsciente toute la production artistique. C'est cela le défi d'Astroculture : changer l'image de l'astrologie en une semaine. Cette folie est prétentieuse ou surréaliste mais ce n'est pas forcément une illusion. Nous pouvons faire faire un grand pas à l'astrologie par des manifestations de ce genre qui remplissent une mission d'information auprès du grand public et se différencient des habituels congrès d'étude réservés exclusivement aux initiés.

RP : Parlons un peu de vous, si vous le voulez bien. Vous êtes né sous une conjonction Saturne-Pluton dominante au carré de Jupiter. Comment analysez-vous et vivez-vous cette configuration ? (17 novembre 1946 - 23h45 - Nantes)

AdC : Saturne-Pluton au dessus de mon ascendant constitue incontestablement un pôle d'exigence qui ne facilite pas toujours l'intégration sociale. En tout cas, ce n'est pas de tout repos. Je travaille 13 à 14 heures par jour. Les idées qui ont présidé à la création de la fédération ne sont probablement pas étrangères à cet aspect "social". Je me surprends souvent à parler d'intégration ou d'efforts … dans le milieu astrologique.

RP : Votre thème est aussi fortement marqué par des dissonances entre le Lion et le Scorpion. Est-ce difficile à vivre et à intégrer ?

AdC : C'est un peu la même chose que le carré. Comment vous en parler simplement puisqu'il s'agit d'un paradoxe à vocation initiatique : l'ombre et la lumière. Sans doute est-ce la raison essentielle pour laquelle je fais de l'astrologie.


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